C’est un jour très sombre pour le monde du manga : hier, Kazuki Takahashi, l’auteur du célèbre manga Yu-Gi-Oh!, a été retrouvé mort par les garde-côtes de Nago, dans la préfecture d’Okinawa. Une enquête est en cours, mais il semblerait qu’il ai eu un accident durant une activité de plongée sous-marine.

Né le 4 octobre 1961, il est difficile de ne pas percevoir son départ comme prématuré. Takahashi avait seulement 60 ans et était encore très actif. L’auteur est mondialement connu pour sa série Yu-Gi-Oh!, qu’il a démarré en 1996 dans le Weekly Shonen Jump, mais comme beaucoup d’artistes, il a tâtonné un peu avant d’en arriver là. Il commence véritablement sa carrière en 1990 avec « Tokio no tsuma« , pour enchainer sur sa première série l’année suivante, « Tennenshoku Danji Bura » qui se terminera en 1992, en 2 tomes.

4 ans séparent donc Yu-Gi-Oh! et sa première série, période durant laquelle il n’y a que très peu d’informations sur sa vie professionnelle. On le sait, aboutir à une série pouvant être pré-publiée dans un magazine, surtout le Jump qui avait déjà une excellente réputation n’est pas chose aisée. Il est donc fort probable que Takahashi ai préparé de nombreux projets potentiels, avant de tomber sur celui qui fait encore sa renommée aujourd’hui.

Le moins qu’on puisse dire, c’est que la série de Kazuki Takahashi est un véritable succès au Japon ! Si Yu-Gi-Oh! fait ses premiers pas à travers des histoires courtes, souvent assez sombres, la saga dévoile tout doucement sa vraie nature au tout début du tome 2 (du chapitre 9 plus précisément) où l’auteur présente le jeu de cartes « Magic & Wizards ». On le devine à ce nom, et il le confirmera plus tard, l’auteur est un fan de jeux de rôle, et du jeu de cartes « Magic », qui existe depuis 1993. Très vite, le jeu est rebaptisé « Duel Monsters » !

En avril 1998, le jeu imaginé par Takahashi va se transformer en véritable jeu de cartes par l’intermédiaire de Bandai ! Cette sortie est bien calculée puisqu’elle va correspondre avec la sortie du tout premier épisode TV de l’adaptation anime par Toei. La toute première génération ne contiendra que 42 cartes, un nombre qui, on le sait aujourd’hui, va rapidement exploser. La seconde génération arrive en juillet de la même année, avec 46 nouvelles cartes et enfin une troisième génération en octobre, avec 30 cartes pour célébrer la fin de l’anime, ou tout du moins de cette première version, le manga étant toujours en cours de publication !

1999, c’est l’année où le manga commence à s’exporter à l’étranger, avec une publication française, au sein de notre catalogue. Tout le monde n’est pas sur un pied d’égalité sur ce sujet puisque les américains devront par exemple patienter jusqu’en 2003 pour découvrir la série.

Alors que le manga continue sa publication, un second anime voit le jour en 2000 par le studio Gallon. Konami reprends très vite les droits de commercialisation sur le jeu de carte et marque une séparation entre le « OCG » (Official Card Game) et le TGC (Trading Card Game). Cette séparation est faite afin de mettre tous les joueurs sur un pied d’égalité, les fans du OCG possédant déjà de nombreuses cartes publiées entre 1998 et 2002.

Le OCG continue de se jouer au Japon, en Corée et en Chine, alors que le TCG est à l’attention du marché Européen, Américain, et du reste du monde.

Les 2 jeux sont un gigantesque succès, et bénéficient d’ailleurs encore aujourd’hui de nouvelles sorties venant l’enrichir. Le manga, de son côté, entame son dernier arc avant de s’achever en 2004, au sommet de sa gloire, au tome 38 ! L’anime se terminera la même année, avec 224 épisodes au total.

Yu-Gi-Oh! est dans tous les esprits et son univers permet de coucher sur le papier beaucoup d’autres projets. Très rapidement, des spin-off vont commencer à voir le jour. Le tout premier est Yu-Gi-Oh! R, en 2004, qui est par ailleurs une « suite » de la saga principale, où l’on retrouve de nombreux personnages connus pour une aventure inédite. Ici, Takahashi laisse ici le dessin à Akira Ito, mais garde les rennes sur le scénario et supervise l’ensemble de la série.

En parallèle de Yu-Gi-Oh! R, l’anime de Yu-Gi-Oh! GX, une série avec de tous nouveaux personnages, est diffusée à la TV. Takahashi contribue également au scénario et à la supervision générale de la série, qui aura droit en 2005 à son propre manga, dessiné par Naoyuki Kageyama. Ce nouveau processus, de démarrer par une série TV puis de l’adapter en manga, semble convaincre les éditeurs qui vont normaliser ce mode de publication.

Ainsi, Yu-Gi-Oh! 5D’S débarque à la TV en 2008 puis en manga en 2009, dessiné par Masashi Sato et scénarisé par Masahiro Hikokubo. C’est le premier manga de la saga sur lequel Kazuki Takahashi ne travaille pas directement, même s’il a participé à la création de l’anime un an plus tôt.

Il sera suivi de Yu-Gi-Oh! Zexal en manga en 2010, dessiné par Naohito Miyoshi et scénarisé par Shin Yoshida, sous la supervision de Takahashi. Son adaptation anime arrivera dès 2011, à laquelle il contribuera également.

En 2011, Takahashi publie un artbook de Yu-Gi-Oh, intitulé Duel Art. Les illustrations sont sublimes et permettent de voir à quel point le dessin de l'auteur a évolué avec le temps. Si Kazuki Takahashi était un mangaka hors pair, il n'avait rien à envier aux autres pointures du milieu en ce qui concerne les illustrations et leur mise en couleur.

La même année, le Guinness Book accorde le record du monde au TCG de Yu-Gi-Oh!, époque à laquelle le jeu a vendu près de 25 milliards de cartes, dépassant ainsi Magic The Gathering, le jeu qui avait inspiré Takahashi 15 ans plus tôt.

La saga semble inarrêtable et continue avec l’anime Arc-V en 2014 et son adaptation en manga en 2015. Fait assez amusant, ce sont des noms connus qui reviennent cette fois avec Miyoshi Naohito (dessinateur sur Zexal), Shin Yoshida (scénariste de Zexal) et Masahiro Hikokubo (scénariste de 5D’S). Le rôle de Takahashi semble s’estomper un peu, mais reste toutefois actif sur la création de l’anime.

Ensuite, pour la première fois depuis près de 17 ans et pour des raisons encore inconnues, arrive l’anime Yu-Gi-Oh! Vrains, qui n’aura pas droit à son adaptations en manga. Takahashi est toujours impliqué dans l’anime, en tant que producteur et chara-designer.

Enfin, les séries les plus récentes sur lesquelles il a travaillé sont Yu-Gi-Oh! Seven en 2020, qui sera adapté en manga et Yu-Gi-Oh! Go Rush!! (anime) en avril 2022.

En 2013, Takahashi publie « Drump« , un one-shot (chapitre unique), toujours au sein du Weekly Shonen Jump.

Deux ans plus tard, en 2015, il recevra le prestigieux Inkpot Award, un prix américain qui récompense un prix qui récompense les auteurs pour leur contribution majeure dans la pop culture depuis 1970.

En recevant ce prix, lors de la San Diego Comic-Con International, il déclare  : « Je suis particulièrement honoré de recevoir cette récompense et je reste humble d’être porté au même rang que les animateurs, auteurs, réalisateurs et artistes qui ont été reconnus pour leur passion et leur contribution au monde artistique »

Nous avons beaucoup parlé de séries anime, mais Yu-Gi-Oh! a également eu droit à 4 longs métrages, parus entre 1999 et 2016. Le plus connu, Dark Side Of Dimensions, propose une aventure inédite se déroulant 6 mois après les évènements du manga d’origine. Kazuki Takahashi marque le coup en dessinant, pour la première fois depuis près de 12 ans, 2 chapitres de manga, faisant office de préquelle au film.

Enfin, en 2018, il publie la minisérie « The Comiq » dans le Jump. Un manga décalé dans lequel on suit un artiste un peu en galère, qui arrive enfin à se faire un nom. Le souci, c’est qu’il découvre que son assistant, qui réalise les décors de sa série, est un ancien détenu qui a été arrêté pour meurtre lors d’une soirée d’Halloween. Mais son assistant est-il vraiment coupable de ce crime atroce ?

 

Comme nous l’avons communiqué hier sur nos différents réseaux, nous avons été choqués et attristés d’apprendre la mort de M Kazuki Takahashi. L’histoire qu’il a créée, les personnages et l’univers qui en ont découlé ont ravi des millions de personnes dans le monde et continuent d’être découverts par de nouvelles personnes. C’est un véritable héritage culturel qu’il laisse derrière lui, et nous ne le remercierons jamais assez pour cela.

Nos pensées vont à ses amis et à sa famille dans ce moment difficile.